« La durabilité devient plus importante que jamais »

CEO Bart Steukers

Entretien avec CEO Bart Steukers et Président René Branders

Depuis des années déjà, l’innovation technologique au service d’une société meilleure et plus durable est le cœur de métier d’Agoria et de l’industrie technologique. En collaboration avec ses entreprises membres, Agoria lance à présent une stratégie commune en matière de durabilité. Qui plus est, en établissant son premier rapport sur la durabilité, l’organisation donne d’emblée le ton : l’impact de l’industrie technologique fera l’objet d’un suivi systématique. Bart Steukers, CEO d’Agoria : « l’engagement en faveur du changement durable constituera le facteur décisif pour l’avenir de nos entreprises. »

L’impact est le maître mot de votre stratégie et de votre rapport. Comment l’industrie technologique peut-elle et entend-elle créer un impact ?

« L’impact a une double signification pour nous. Pour commencer, nous n’avons pas peur de balayer devant notre propre porte. Il est indéniable que certaines de nos activités contribuent au changement climatique ou à la pollution de l’environnement. En tant qu’employeur, nous avons également un impact sur la santé humaine et le bien-être, qui, dans certains cas, peut être négatif. Nous prenons nos responsabilités en vue de réduire les impacts négatifs sur l’homme et l’environnement, où qu’ils se manifestent. »

« En termes d’impact, les leviers dont l’industrie technologique dispose pour permettre et stimuler un changement durable sont tout aussi importants. Les solutions technologiques apportent des réponses à presque tous les défis sociaux, du changement climatique au vieillissement de la population. Voitures électriques, infrastructures de recharge, pompes à chaleur, composants pour les méga-éoliennes, recyclage des métaux critiques, mobilité en tant que service, infrastructures de circulation intelligentes, outils et applications aidant les personnes âgées à rester autonomes plus longtemps : les manières dont l’industrie technologique peut contribuer à améliorer durablement notre société sont infinies. Avec notre stratégie de durabilité, nous voulons utiliser l’ensemble de ces innovations technologiques de manière encore plus ciblée dans les domaines où nous pouvons faire la plus grande différence. Nous sommes animés par la plus grande création de valeur possible, tant économique que sociale. »

Cette stratégie de durabilité implique-t-elle un bouleversement pour l’industrie technologique ?

« Il faut se rappeler que la durabilité n’a rien de nouveau pour notre secteur. C’est pourquoi, au sein de l’industrie technologique, nous nous concentrons sur la gestion d’entreprise durable : Agoria a lancé diverses initiatives au fil des ans sur des sujets tels que l’économie circulaire et la diversité. Un bon exemple étant Be The Change, notre programme en matière de talents, de diversité et d’emploi durable. De telles initiatives restent essentielles, mais aujourd’hui, nous voulons aller plus loin. Cette stratégie nous permet d’ancrer encore plus formellement la transition durable dans notre secteur. »

« L’industrie technologique belge peut être un énorme levier pour la transition mondiale. Il s’agit d’une responsabilité que nous voulons assumer pleinement, mais aussi d’une énorme opportunité pour notre secteur : la transition durable constitue une occasion sans précédent. Par notre stratégie, nous voulons donc également encourager nos entreprises membres à s’attaquer à la durabilité et à investir dans ce domaine dès à présent afin d’être résilientes et à l’épreuve du temps à l’avenir. »

« La transition durable représente une opportunité sans précédent. Avec notre stratégie, nous voulons donc également encourager nos membres à prendre la durabilité au sérieux. »
Bart Steukers – CEO

Quels sont les plus grands défis auxquels est confrontée l’industrie technologique ?

« La pression de la crise climatique est bien sûr énorme. Le Pacte vert pour l’Europe oblige les entreprises à faire partie de la solution, et c’est une bonne chose. Nous devons les aider à prendre leurs responsabilités grâce à la réduction de leurs émissions. En outre, nous voulons maximiser notre influence dans l’utilisation des innovations technologiques afin de réduire les émissions des autres secteurs et de passer en masse aux énergies renouvelables. Dans l’étude Digital for Climate, par exemple, nous étudions comment l’industrie numérique peut rendre d’autres secteurs, comme celui de la construction, intrinsèquement plus durables. »

« L’urgence est presque aussi grande en matière de talents. Des pénuries sont constatées partout sur le marché du travail. Pour concrétiser la transition écologique, nous devons résoudre ce problème. Comment faire en sorte d’attirer davantage de personnes dans l’industrie technologique ? Comment faciliter l’accès des talents aux entreprises ? Comment pourvoir les métiers en pénurie ? Comment promouvoir l’emploi durable ? Au total, nous formulons douze domaines d’impact, mais ces deux-là posent à mon avis les plus grands défis. Nous avons remarqué que la sensibilisation à ces questions a considérablement augmenté dans les entreprises, mais il faut encore faire plus. »

Comment la crise en Ukraine affecte-t-elle ces défis ?

« La pandémie de coronavirus et maintenant la crise ukrainienne ont créé une crise mondiale sans précédent dans le domaine des matières premières et de l’énergie. Inflation, prix de l’énergie historiquement élevés, disponibilité réduite des matières premières et des produits, dépendance de l’Europe à l’égard d’autres régions en ce qui concerne certains matériaux critiques : toutes ces tendances rendent la transition verte, circulaire et numérique encore plus cruciale. Bien que certains sous-secteurs et certaines entreprises traversent actuellement une période très difficile, ce qui me touche personnellement, je suis convaincu que les événements actuels rendront la transition durable encore plus nécessaire, également pour maintenir la compétitivité de nos entreprises. Pendant la crise du coronavirus, nos entreprises ont fait preuve d’une résilience considérable : elles ont prouvé qu’elles pouvaient agir rapidement pour survivre économiquement et qu’elles étaient là pour leurs collaborateurs en temps de crise. » 

Votre stratégie de durabilité a été élaborée de manière concrète et transparente : chaque ambition s’accompagne d’engagements concrets. Au moyen d’un ensemble complet d’indicateurs, vous voulez montrer au monde extérieur à la fois vos progrès et votre marge d’amélioration pour les années à venir.

« La crédibilité revêt une importance capitale à mes yeux. Si, en tant qu’industrie, vous vous dites que vous faites partie de la solution, alors vous devez aussi oser formuler des ambitions mesurables autour de celle-ci. Ces derniers mois, nous avons travaillé d’arrache-pied sur ces engagements concrets avec notre direction et notre organe d’administration, une représentation de plus de 30 entreprises qui reflète l’industrie technologique. Nous plaçons la barre haut, mais en même temps nous voulons être réalistes ; le greenwashing ne fait pas partie de notre vocabulaire. Nous avons été critiques envers nous-mêmes : où en sommes-nous aujourd’hui et où voulons-nous aller ? Quelles sont nos forces, et dans quels domaines devons-nous nous améliorer ? »

« Si, en tant qu’industrie, vous vous dites que vous faites partie de la solution, alors vous devez aussi oser formuler des ambitions mesurables autour de celle-ci. »
Bart Steukers – CEO

« Pour être crédible, la transparence est essentielle. Avec ce premier rapport, nous voulons être transparents quant à nos réalisations, mais aussi modestes, car nous montrons également que nous n’avons pas encore atteint nos objectifs. Nous dépeignons les choses telles qu’elles sont réellement et ne les présentons pas sous un jour plus positif. Pour les prochains rapports, nous voulons prendre des mesures dans les domaines où nous ne sommes pas encore assez avancés. Pour chaque impact négatif du secteur, nous, les membres d’Agoria, essayons de formuler des propositions et des solutions constructives afin que les entreprises de notre secteur prennent des mesures dans la bonne direction. Parallèlement, notre rapport vise à expliciter la contribution durable de l'innovation technologique et à la communiquer clairement, afin de pouvoir inspirer les autres. »

Cette stratégie de durabilité envoie-t-elle également un signal aux collaborateurs de l'industrie technologique ?

« Certainement. Nous souhaitons également rendre des comptes à aux collaborateurs de nos entreprises. Ceux-ci veulent savoir ce que les entreprises et leurs employeurs font pour réduire leur impact sur l'environnement, comment ils contribuent à résoudre les problèmes sociétaux et quel est leur impact positif sur l’homme et la planète. Pour attirer les collaborateurs et les garder dans notre secteur, la durabilité et une communication claire deviennent des facteurs clés de succès. Dans le même temps, nous souhaitons inspirer nos collaborateurs et les inciter à se mouiller. Nous voulons que chacun se sente partie prenante de notre discours de durabilité et découvre par lui-même ce qu'il peut apporter. Avec la stratégie que nous lançons aujourd'hui, nous souhaitons renforcer le dynamisme du secteur. Cette inspiration se répandra ensuite au-delà du secteur : vers d'autres secteurs, entreprises, parties prenantes et collaborateurs. »

Votre stratégie de durabilité et votre premier rapport constituent une étape importante. Comment évoluerez-vous ? 

« Il s'agit d'un travail en cours et cela le restera. Nous avons écrit nos ambitions afin de savoir où nous voulons aller. Nous avons fixé un point de référence pour suivre nos progrès dans les années à venir. Le fait que tout cela soit maintenant sur papier est une première étape importante. Mais tout n’est pas terminé pour autant. »

« À l’avenir, il s'agira d'évoluer davantage vers l'industrie technologique du futur, sous sa meilleure forme. Nous devons oser ajuster ou réviser nos ambitions dans les mois et les années à venir. L’entrepreneuriat durable n'est pas figé, nous devons constamment nous remettre en question. »

La transition durable apporte-t-elle aussi des changements pour Agoria ?

« L'étape suivante consiste à intégrer notre stratégie de durabilité à tous nos plans, programmes et projets. Nous sommes donc engagés dans un exercice de réflexion approfondie : sur quoi devons-nous nous concentrer avec notre organisation sectorielle ? Comment pouvons-nous soutenir, faciliter et encourager au mieux nos membres dans cette transition durable ? Comment souhaitons-nous coopérer avec nos partenaires et nos parties prenantes ? La durabilité doit commencer à vivre dans notre organisation une fois pour toutes. Elle devient partie intégrante de notre fonctionnement. »

« Nous allons développer davantage nos services de durabilité et nous concentrer sur les besoins au sein des entreprises. Encourager nos membres, leur tendre la main et les aider à relever les défis de la durabilité et à atteindre les objectifs imposés ou auto-imposés : tel sera le fil conducteur de nos activités dans les années à venir. »

Quelles sont les prochaines étapes ?

« Notre événement annuel Agoria en mai se concentrera sur les engagements de ce rapport et les actions que nous déployons pour réaliser nos ambitions. Comme dans ce rapport, nous accorderons également une grande attention aux cas inspirants de nos entreprises dans la communication en amont de l'événement annuel. En soulignant les efforts déjà réalisés par le secteur, nous souhaitons motiver, inspirer et soutenir nos entreprises dans la prise de nouvelles mesures. S'il s'avère que les entreprises adhèrent à notre engagement de durabilité et formulent des ambitions fortes pour elles-mêmes, notre engagement sera d'autant plus fort. Ainsi, nous améliorerons l'impact et la solidité des cas dans les années à venir. »

René Branders

« ‘Improving quality of life’ est la devise d’Agoria et c'est aussi l'objectif de l'entrepreneuriat durable. Grâce à notre engagement de durabilité, nous souhaitons connecter tous ceux que la technologie inspire. Nous nous engageons à soutenir au mieux nos entreprises membres pour qu'elles puissent opérer de manière durable dans la société. Et, last but not least, nos solutions technologiques nous permettent de contribuer à une plus grande prospérité, à plus de bien-être pour les gens et à une meilleure planète. » 

René Branders – Président d’Agoria